Maman a passé une petite journée à Lille cette semaine et je lui ai demandé de me ramener deux tubes d'un gloss qu'on ne trouve que chez Séphora. Et des Séphora on n'en trouve qu'en France. Elle s'est bien acquittée de sa mission mais n'a pas pu s'empêcher de s'étonner du prix de ces fantaisies cosmétiques. Elle m'a demandé: "Tu sais combien ça coûte ?" et j'étais totalement incapable de répondre. Non, je n'avais aucune idée de ce que ça pouvait bien coûter. Et sa question m'a sérieusement interpellée. Surtout en ces temps d'inflation violente.
Il fut un temps dans ma vie où un franc était un franc et où nos deux salaires réunis nous obligeaient à une vigilance quotidienne. Je connaissais par coeur les prix de tous les articles que j'achetais, je collectionnais les petites enveloppes virtuelles pour chaque mois. Une enveloppe pour l'alimentation, une autre pour les produits de beauté, une pour le loyer et les charges, une pour les vacances, une pour les cadeaux, etc.. Tout était calculé au franc près et l'on vivait en permanence dans le rouge et sur la corde raide. Quand Quentin est né, on a enfin décidé de s'offrir un micro-ondes - ce dont, entre parenthèses, je me passerais éperdument aujourd'hui mais qui était tellement révolutionnaire à l'époque que je pensais qu'il allait changer notre vie - et on a grappillé mois par mois les malheureux 250 € nécessaires. Je me souviens encore aujourd'hui du sentiment de victoire que j'ai ressenti.
Je me souviens aussi des frustrations, mineures j'en conviens, mais réelles. Je regrette encore toujours aujourd'hui de ne pas avoir eu le plaisir d'acheter les vêtements de mes enfants et de m'être contentée de ceux des enfants d'une amie plus grands que les miens.
Et puis un jour, j'ai changé de boulot, j'ai gagné ma vie bien plus qu'à la sueur de mon front et imperceptiblement ma relation à l'argent a changé. L'argent ne fait en rien mon bonheur, Dieu merci mais l'absence d'angoisse et de boule à l'estomac lorsque la machine à laver ou la voiture menace de rendre l'âme est un luxe dont je ne me lasse pas, Dieu merci aussi.
Alors, j'avoue, je ne connais plus les prix au détail, je ne collectionne plus les petites enveloppes, je dépense parfois sans réfléchir. Ce sont surtout les enveloppes "beauté" (dépenses à fonds perdu, j'en conviens) et "cadeaux" qui ont explosé.
Ni Job - puisque j'en ai un - ni Crésus - parce que pas encore complètement crazy, je ne suis pourtant pas aussi raisonnable que je ne devrais. Heureusement, l'Homme veille, voire surveille. Il joue le rôle de garde-folle et me maintient dans les rails de la sagesse. Ce qui ne l'empêche pas non plus d'avoir ses petits accès de folie.
Ton post fait écho pour moi qui suit dans une situation boulot précaire avec des étudiants à charge ; me voici revenue 15 ans en arrière à compter et regarder pour tout et parfois quand je vous lis, entre Budapest, le Kenya, les nounous à domicile et plein d'autres détails qui indiquent un tout autre train de vie, bien loin de la vie de la plupart d'entre nous. Ceci dit profitez, profitez, et joyeux Noël, gras ou maigre ;-)
Rédigé par : pat | 19 décembre 2008 à 09:20