Quand j'y pense, j'ai vraiment eu une enfance de rêve. J'ai joué dans les endroits les plus farfelus et je me suis prise au jeu d'en faire la liste.
L'appartement qui m'a vue grandir de 6 à 10 ans n'avait qu'une seule chambre que je partageais avec Swiss'Sis. Mes parents dormaient dans le salon et Swiss'Sis n'était qu'un bébé. Alors je me suis inventée une salle de jeux dans la cave de l'immeuble. Je ne me souviens plus trop de la configuration des lieux mais je me souviens de quelques paires de chaussures de maman et de l'une de nos anciennes voisines dont une paire couleur rouille à bouts très pointus. J'adorais déjà me déguiser et la cave était ma maison. Avec le recul, je me dis que cette cave devait être particulièrement rassurante parce que, plus tard, dans les autres maisons où j'ai habité, même adulte, je n'ai jamais aimé descendre seule dans la cave.
A la même époque, je me suis fait des amis dans le quartier et j'ai beaucoup joué dans la rue. Voilà bien un terrain de jeux qui est devenu locus non gratus et que rares sont les enfants qui jouent dans la rue en Belgique, surtout depuis l'affaire D.. Mais pour moi, ce fut un terrain de jeu fabuleux. Il suffit d'un peu d'imagination - et je n'en ai jamais manqué - et l'Institut de Santé Publique ci-dessus devenait un loft sur trois niveaux avec une chambre à l'arrière dans un nid de verdure. J'ai passé là des mercredis après-midi de rêve.
Puis quand Sis'cile s'est annoncée, nous avons déménagé dans un appartement deux chambres et un salon immense. Un palais à mes yeux. Avec en prime une immense toilette que je considérais comme un luxe suprême après les toilettes dans la cage d'escalier de l'appartement précédent. Là, j'ai remplacé la cave par une mansarde au neuvième étage de l'immeuble. Outre le plaisir un peu coupable de prendre l'ascenseur toute seule, j'ai vécu là des moments inoubliables avec Swiss'Sis, puis Sis'cile, répétant à l'envi mon rêve de devenir institutrice, préparant scrupuleusement mes cours (j'ai encore quelque part ces grands cahiers de préparation de cours de français, d'histoire, de géographie, de calcul), alignant les élèves sur un meuble, ouvrant les tiroirs pour mieux les asseoir, rédigeant moi-même les petits mots d'excuse des parents pour l'une ou l'autre absence, organisant aussi pour eux la visite médicale et tant d'autres choses que j'ai aujourd'hui sans doute oubliées.
Et puis, il y a eu les multiples terrains de jeux à la campagne. Le paradis sur terre pour enfants. Il y a bien sûr le jardin de la maison avec ses trois pelouses, la grande, la petite et la plus petite, appartements respectifs de la grande, de la moyenne et de la petite, droit d'aînesse oblige. Les chemins de pierre en guise de rues, de carrefours, où nos vélos faisaient office de voitures, les mariages organisés à grands coups de déguisement (les mêmes cérémonies ont été répétées par mes propres enfants), les soupes d'herbes et de terre, les branches pleureuses du cerisier du Japon en guise de tentures. Il y a eu le grenier de cette même maison - avant qu'une partie ne soit transformée en chambres - où j'avais élu domicile d'un club de jeunes (mes soeurs, une cousine et une voisine tout au plus) aux règles très strictes, aux murs tapissés de posters encartés dans Salut les Copains et qui représentaient à mes yeux le summum de la liberté.
Enfin, il y a eu le terrain fascinant de l'épicerie de mon grand-père qui m'offrait un studio meublé non occupé, destiné à la propriétaire de l'épicerie en vue de sa retraite et où j'avais le droit de jouer si je n'abimais rien. Le studio était meublé de manière terriblement kitsch avec une chambre à coucher aux placards intégrés - le summum du luxe à l'époque - et un lit totalement recouvert de tissu assorti au couvre-lit - un lit de princesse à mes yeux d'enfants -; une cuisine équipée dans une véranda donnant sur le jardin et un petit salon minuscule. Peut-on imaginer un terrain de jeux plus magique pour une petite fille ? Et pour compléter la félicité de mes dix ans, j'avais le droit de "faire mon marché" dans l'arrière-boutique du magasin à quelques pas de là en traversant la cour d'où je ramenais dans "mon" studio des boîtes de petits pois, de corned beef (?) et des paquets de poudre à lessiver grandeur nature !
Tous ces terrains de jeux restent ancrés dans mes souvenirs de manière tenace et je donnerais cher pour revivre un seul instant de ce bonheur d'enfant.
Quels beaux souvenirs que ceux qui nous ramènent aux jeux de l'enfance. Une insouciance, une complicité entre frères et sœurs. Quelque chose de fort.
Et une étonnante mémoire.
Merci pour ce joli billet.
La première photo ressemble a un coin de mon jardin.
Rédigé par : Celestine | 24 février 2014 à 23:40
Tu m'as fait revenir en arrière et chercher mes terrains de jeux :) C'est doux.
Ce qui me plait ici, c'est que les enfants jouent toujours dans la rue ...
Rédigé par : ms | 28 février 2014 à 09:01
Cel: l'insouciance, oui c'est vraiment ça qui me revient....
Ms: Tu devrais encore écrire Marie.... :-)
Rédigé par : Myosotis | 28 février 2014 à 23:12