Elle me parle de son fils. Je lui dis "Ton fils Rodrigo ?" Et son sourire qui s'illumine me renvoie tout l'écho de ce prénom donné à son petit dernier qu'elle a quitté il y a bientôt dix ans pour s'exiler de l'autre côté de l'Atlantique pour assurer un avenir décent à ses trois enfants. Elle est tout simplement extraordinaire.
Je lis "Réparer les vivants" de Maylis de Kerégual et je dois m'arrêter de temps en temps. Surtout quand je lis dans le bus. Je me projette trop dans cette maman qui doit donner le jour même de l'accident de son fils son accord pour le don d'organes. Il est cérébralement mort et le temps presse si on veut transplanter des organes en bonne santé. Mais comment accepter que son fils est mort alors que son coeur bat, qu'il est là tout chaud, alité comme s'il était simplement endormi. Je ne suis plus qu'une boule d'émotions.
Elle travaille au "bureau de maman" pour quelques mois. Cela ne se passe pas sans mal parce que, même si ce bureau est une grande famille - on ne compte plus les cousins, neveux, maris, femmes, soeurs, frères, filles, tantes, nièces, cousines des uns et des autres dans cette boîte -, la position de sa maman offre trop le flanc à la critique. Mais elle tient le coup malgré les difficultés. Elle vient parfois le midi un petit quart d'heure, rien que pour nous deux, elle passe encore le soir avant de partir, vite un coucou furtif. Et puis un soir, un baiser rapide sur la tête de sa maman assise de dos. Et le chef de sa maman se retrouve tout ému d'avoir surpris ce baiser aussi discret que naturel.
C'est notre dernier jour de travail. Ce soir, on ferme la boutique pour deux semaines. Et chacun part dans sa famille, ici à Bruxelles, ou en France, qui en Grèce, qui en Italie. On s'embrasse, on se souhaite tout le meilleur pour Noël, on promet de se retrouver en plein forme l'année prochaine. Et lui le chef bougon, si parano qu'il croit toujours qu'on le dénigre à chaque fois qu'on lui tourne le dos ou que tout le monde lui en veut, il m'embrasse aussi mais me retient un peu plus longtemps dans ses bras et je comprends, émue, qu'il reconnaît enfin ma loyauté et mon affection pour lui.
Ils sont trois animateurs de radio/TV et ils se sont engagés pour un marathon de cinq jours d'animation 24 heures sur 24, enfermés dans un cube de verre sur une place à Liège, ne se nourrissant que de liquides, et animant sans relâche une action pour récolter des fonds pour les 40 000 enfants de familles vivant sous le seuil de pauvreté en Belgique. Ils sont tout simplement géniaux. Et émouvants de générosité.
Beaux moments d'émotion...
Rédigé par : Un petit Belge | 21 décembre 2014 à 21:20
très beau texte...
Rédigé par : isa | 21 décembre 2014 à 22:58
Je ne sais pas laquelle de tes émotons me serre le plus la gorge...Peut-être celle de ton chef qui te serre dans ses bras. Ça c'est beau !
;-)
Rédigé par : celestine | 22 décembre 2014 à 22:04
Je passe te souhaiter un joyeux Noël. A bientôt Myo.
Rédigé par : Un petit Belge | 24 décembre 2014 à 11:59
Merci PB. Je te souhaite déjà une très belle année 2015 !
Rédigé par : Myosotis | 27 décembre 2014 à 22:34