Long long silence parce que les mots restent prisonniers dans la plume, les larmes dans la gorge et les envies réduites à se cacher sous la couette, la tête enfouie sous l'oreiller pour toujours.
Depuis mon dernier billet, Vovo s'est finalement endormi, Mamy L. est finalement rentrée chez elle parce que plus personne n'en voulait, ni l'hôpital (plus assez malade), ni la maison de repos (pas assez vaillante ni autonome, seule place possible chez les déments séniles, ce qu'elle n'est pas non plus), ni les soins palliatifs (en fin de vie, mais pas assez mourante). Sa fille a décidé de la ramener à la maison puisque tel était son souhait, au grand dam de l'Homme qui ni'maginait pas l'entreprise possible. A tort, puisqu'elle semble même aller beaucoup mieux chez elle.
Mais si je n'écris plus depuis tout ce temps, c'est que l'impensable est arrivé. On s'attendait à d'autres départs, pas au sien. Bien sûr, il a tiré la sonnette d'alarme quand il a été hospitalisé pour un oedème pulmonaire lié à une insuffisance rénale maximale. On savait que la dialyse lui pendait au nez. Lui l'a un peu nié mais mis devant le fait accompli, il a bien dû s'y résoudre. Après quelques séances pendant son hospitalisation, il est rentré à la maison le vendredi pour commencer ses allers-retours trois fois par semaine à l'hôpital le lundi suivant. Son coeur fatigué s'est endormi dans le taxi de retour le premier lundi. Le Samu a bien essayé de le réanimer mais quand nous sommes arrivées, Sis'Cile et moi, ils venaient d'arrêter d'essayer.
Il n'y a rien à dire. Tous ceux qui sont passés par là savent de quoi je parle. Tous ceux qui ne le sont pas, le sauront assez tôt. Les semaines qui se sont écoulées nous ont assommées physiquement et psychologiquement. On croit que la vie va s'arrêter et elle ne s'arrête pas. On voudrait que la vie s'arrête pour vivre les derniers moments - même s'il est déjà mort - au ralenti, le regarder encore et encore, pouvoir toucher ses mains, son visage encore et encore une dernière fois, mais la vie ne s'arrête pas. Les visites au funérarium sont réglementées, limitées, facturées, l'heure c'est l'heure. Le temps ne s'arrête pas, il faut se presser si on veut lui préparer une belle cérémonie d'au revoir, choisir parmi toutes les photos de lui celles qui nous parlent le plus, écrire un texte, des mots pour parler de lui, faire les démarches obligatoires, le temps ne s'arrête pas, pas le temps de pleurer tout le temps qu'on voudrait, pas le temps de penser à ce qui nous arrive. Il faut rester debout, vaillants petits soldats et assurer, toujours assurer.
Puisque je lui ai dédié ce blog, j'ai bien pensé arrêter d'écrire ici. Mais je me sens un devoir d'écriture vis-à-vis de je ne sais trop qui, lui, moi, les petits-enfants qui sont là, je ne sais.
Mais je lui dédie cette tentative de reprise de plumes.