Le quatrième mur - Sorj Chalandon
Vous ne savez pas. Personne ne sait ce qu'est un massacre. On ne raconte que le sang des morts, jamais le rire des assassins.
J'avais hurlé qu'ailleurs, dans des berceaux, des bébés avaient eu la gorge tranchée. Que des enfants avaient été hachés, dépecés, démembrés, écrasés à coups de pierre. Et ma fille pleurait pour une putain de glace ? C'était ça, son drame ? Une boule au chocolat tombée d'un cornet de biscuit ?
Le quatrième mur ?..... Une façade imaginaire, que les acteurs construisent en bord de scène pour renforcer l'illusion. Une muraille qui protège leur personnage. Pour certains, un remède contre le trac. Pour d'autres, la frontière du réel. Une clôture invisible qu'ils brisent parfois d'une réplique s'adressant à la salle.
La conversation amoureuse -Alice Ferney
L'horloge des femmes et celle des hommes dans l'amour n'ont pas les mêmes aiguilles.
Il disait: vous et moi, je ne sais pas ce que c'est. Il n'avait jamais cessé de le penser. Ils étaient liés. Pourtant il ne savait pas dire par quoi. Il ressentait du désir, oui, il en avait ressenti beaucoup le premier soir. Mais autre chose contrecarrait ce désir. Une grande tendresse. Le sentiment d'une gemellité secrète. Cette femme était une soeur, une semblable. Jamais il n'avait rencontré un être qui lui ressemblât à ce point. Aussi se refusait-il à en faire une maîtresse.
Les relations extra-conjugales sont vouées au néant, elles n'ont ni le temps ni l'espace pour s'épanouir.
Je cherche une définition du verbe aimer, dit Louise. Et elle répéta le cheminement de sa rêverie. Est-ce que c'est: Etre attiré irrésistiblement ? Etre attiré longtemps ? Avoir envie de toucher ? Coucher avec ? Avoir des enfants avec ? Vivre avec ? Souffrir pour ? (....) Compter avec ? (....) Compter sur ? Ne pas lutter avec ? Etre dans l'éblouissement ? Ne pas survivre à la mort de ? Attendre ? Ne faire qu'attendre ? Vouloir l'amour de ? Vouloir le bien de ? S'oublier ? Sortir de soi ? Se dépendre de soi-même ?
L'insolente de Kaboul - Chékéba Hachémi
Et puis, en mars 2001, les Bouddhas sont tombés. Ces deux statues monumentales excavées dans la montagne surplombent la vallée de Bamiyan, au centre de l'Afghanistan, depuis quinze siècles. Leur pilonnage à l'artillerie agit immédiatement comme une sonnette d'alarme et sonne l'heure d'une véritable prise de conscience internationale: les talibans sont donc une menace ! Au début, je suis énervée par l'émoi général. Les Japonais sont offensés ? Je le comprends. Mais l'Occident ? Qu'est-ce qui se joue ici ? Les Bouddhas font partie du patrimoine de l'humanité. Cette notion de "patrimoine commun" est-elle donc si forte ? Les images de femmes lapidées dans le stade de Kaboul le sont-elles moins ? Il aurait fallu classer la femme au patrimoine de l'Unesco, on aurait gagné du temps.
Ici, on n'évoque que les soucis qui ont une solution. Les autres, la tristesse, la mémoire des morts, restent une conversation entre soi et Dieu.
Je ne t'étonnerai pas en te disant que je choisis sans hésiter le deuxième...
Je ne parviens jamais à entrer dans un roman qui parle de massacre ou de guerre.
On ne se refait pas.
Et je sais que je passe certainement à côté de bien des chefs d'œuvre...
Bisous ma belle.
Rédigé par : Celestine | 06 mai 2014 à 18:27
Cel: tu ne m'étonnes pas, non mais en même temps, ces phrases-là m'ont tellement marquée que je devais les mettre en exergue. Et oui, le livre est magnifique malgré tout. Peut-être pas un chef d'oeuvre mais tellement plein d'humanité.
Rédigé par : Myosotis | 07 mai 2014 à 17:56