Je suis Italienne de coeur. Un temps, je fus grecque. Je le suis encore. Disons que j'ai un coeur en forme de trèfle à 4 feuilles: deux oreillettes belge et européenne et deux ventricules italien et grec.
Je ne m'étais pas préparée à ce coup de coeur. J'ai étudié l'anglais et l'espagnol. Puis j'ai ajouté le grec par passion pure, le portugais par curiosité et le danois pour accompagner Sis'Cile. Je me suis empressée d'oublier ce dernier malheureusement, faute de Viking à proximité pour m'entretenir (enfin, je me comprend). Mais l'italien, non, pas du tout.
Et puis quelquefois, la vie décide pour vous. Le bureau pour lequel je travaillais a fermé ses portes pour céder ses activités à un bureau situé à Turin. Et qui l'aimait (le bureau), le suivait.
Pas question pour moi de suivre. J'avais un mari qui travaillait à Bruxelles, trois petits enfants dont les grands parents ne pourraient pas se passer, des parents, une soeur, des amis. Mais l'Homme n'a pas vu les choses de cet oeil là. Il m'a poussé de toutes ses forces contre toute ma résistance. Et je suis partie seule d'abord. La mort dans l'âme. J'ai fait l'aller-retour toutes les semaines pour retrouver les miens. Au bout de neuf mois, les enfants m'ont rejointe et l'Homme a commencé les allers-retours. Au bout de 6 mois, il a pris un congé sans solde et nous a rejoints. Nous nous sommes installés pour 4 belles années. Les plus belles de notre vie à ce jour. Du moins aux dires des enfants et aux miens.
Et nous sommes devenus des tifosi de la Fiat, du Nutella, de la truffe d'Alba, du Barolo, de la Juve, de la focaccia, de la pizza au mètre, de la glace au marron glacé, des marrons glacés tout court, de la Topolino, des Superga, du petit espresso au bar, d'Alessandro Baricco, de Carla..., des pistes de Sestrière le dimanche, du Slow Food, du Martini, du gianduja, du Saint Suaire, des gressini, du Pô, de la bagna cauda, du val d'Aoste, des lunettes de soleil, du Saint Graal, de la Rai 1, 2 et 3 (si, j'avoue) et je pourrais continuer pendant des heures.
Moi qui ne voulais pas quitter mon cocon bruxellois, j'ai aimé cette ville et ce pays à un point difficile à expliquer.
Après 5 ans, le bureau n'a plus voulu de moi et m'a forcée à quitter ce pays auquel je m'étais attachée au-delà du rationnel. Quitter cette langue dans laquelle je rêve encore aujourd'hui, quitter ces collègues et amis, forcer les enfants à quitter le lycée et les amis, quitter la vue des montagnes, quitter cet appartement dont 10 ans plus tard, aucun de nous 5 n'a encore fait vraiment le deuil.
Italiens nous sommes restés dans l'âme. Dans les attitudes, les habitudes, la béatitude et la plénitude. Porca miseria !